Témoignage du handbiker Van de Steene, confiné en Espagne : « se structurer quand ça devient difficile mentalement »
« L’Espagne et la Belgique en ce moment, c’est le jour et la nuit. Ici tu ne peux vraiment pas sortir sans en payer le prix ». Jonas Van de Steene est un athlète paralympique belge qui pratique le handbike (para-cyclisme). Il vit en Espagne, plus précisément à Playa Banca, une ville côtière de l’Ile de Lanzarote, dans les Canaries. Des règles très strictes de confinement y sont appliquées. « Il est essentiel de se structurer quand on est bloqué chez soi. Mon réveil continue à sonner à 7h, comme d’habitude ».
Mi-février, Jonas Van de Steene sentait son pic de forme arriver. Il a remporté une compétition internationale qui se tenait à Lanzarote. Ses plans ont ensuite été bousculés par l’épidémie de Covid-19. Comme tous les sportifs qui fonctionnent avec des objectifs, il a été forcé de revoir toute son organisation. « Ce n’est pas agréable évidemment mais j’essaye maintenant de développer une approche sportive adaptée à ma situation ».
« La Guardia Civil est à chaque coin de rue. Ils contrôlent sévèrement, mais cela leur arrive aussi de diffuser ‘joyeux anniversaire’ pour les enfants. »
Jonas Van de Steene décrit la situation à Playa Blanca comme étant surréaliste. « Le jour avant que les mesures ne soient prises, j’étais encore au fitness. Mais le lendemain, le lockdown a été annoncé et depuis, je suis enfermé chez moi. Six semaines se sont écoulées », explique-t-il. L’athlète ne peut quitter sa maison que pour promener son chien pour faire des grandes courses. Et même dans ces moments-là, tout n’est pas permis. « Il faut faire ses courses dans le magasin le plus proche, et cela doit être des courses importantes, pas juste du pain. Sans quoi tu risques un contrôle de police. Et pour promener mon chien, je ne peux m’éloigner à plus de 150m de mon habitation. La Guardia Civil se trouve à chaque coin de rue et des hélicoptères font régulièrement des rondes. Celui qui ne respecte pas les mesures risque une amende de minimum 600 euro. D’un autre côté, la police diffuse ‘Joyeux anniversaire’ aux enfants dont c’est l’anniversaire. Ils doivent aussi donner quelque chose aux gens. »
Cette situation n’est donc pas comparable avec celle d’autres pays. « La Belgique et ici, c’est le jour et la nuit. Mes amis handbikers belges peuvent encore aller rouler régulièrement dehors, même avec un ami ou quelqu’un de leur famille. Ici, c’est impensable. » précise Van de Steene. « Mais la différence dans la façon dont les gens vivent leur quarantaine n’est pas uniquement liée au pays. Compare Messi qui peut nager, jouer au tennis chez lui avec sa famille, avec l’habitant moyen de Wuhan. D’un côté c’est la fête, de l’autre c’est l’isolement dans huit mètres carrés ».
« Je me crée une structure, je continue à avoir des contacts sociaux, et je me dépense physiquement. Tout cela aide. »
« Pour ces derniers, c’est beaucoup plus dur. Bien sûr, personne ne pouvait se préparer à une quarantaine aussi longue mais pour ceux qui sont seuls chez eux, avec des facilités limitées, cela devient réellement difficile… Il faut parvenir à rester fort mentalement. » Poursuit Van de Steene, qui vit seul chez lui. Comment traverse-t-il cette solitude ? « Je me crée une structure. A 7h, mon réveil sonne, et je prends mont petit déjeuner. Mon programme journalier repose principalement sur des entrainements sur rouleau et du fitness. Je travaille également à ma connaissance de l’allemand. Je m’entraine en effet avec une équipe allemande ici, et je veux aussi continuer à me stimuler intellectuellement. Je maintiens aussi mes contacts sociaux, via les nouveaux moyens de communication. C’est important de continuer à se détendre."
A-t-il pensé à revenir en Belgique ? « Oui, j’ai pris contact avec l’ambassade belge à Tenerife. Retourner en Belgique est possible, mais il faudra alors sans doute passer par une phase de quarantaine. En plus, le rapatriement n’est possible que via Barcelone ou Madrid, épicentres de l’épidémie en Espagne. Il n’y a là-bas dans ces aéroports aucun hôtel ou magasin ouvert. Attendre pendant des heures dans un fauteuil roulant dans ces aéroports serait très pénible. Et une fois à Madrid ou Barcelone, il faut encore que le vol qui m’amènerait en Belgique soit maintenu. Pour tout cela, j’ai préféré rester ici pour le moment.
Un texte de nos collègues de Parantee-Psylos.